Lee Miller, le mannequin, la femme et la guerre

Le mannequin devenu photographe de guerre
Née en 1907 dans l’Etat de New-York, Elizabeth Miller de son vrai nom est issue d’une famille privilégiée. A peine âgée de 17 ans, la jeune américaine à la beauté incontestable débute une carrière de mannequin. Elle devient rapidement une icône incontestable des années 1920-1930. Elle accepte de poser pour Edward Steichen, photographe en chef du Vogue américain. Cette vie ne lui convient pas longtemps puisqu’elle ne supporte pas de n’être réduite qu’à son physique avantageux. En contrepartie, elle demande donc à Edward Steichen de lui apprendre les rudiments de la photographie.

Muse et assistante de Man Ray, Lee Miller apprend et peaufine son art
En 1929, Lee Miller s’installe à Paris et devient l’assistante – et la muse – d’un célèbre photographe français, Man Ray. Elle va poser pour lui, mais elle apprend surtout à ses côtés différents procédés photographiques qui lui serviront plus tard dans sa carrière. Avec Man Ray, Lee Miller entre en contact avec le monde des avant-gardes artistiques parisiennes. Elle se rapproche plus particulièrement des membres du mouvement surréaliste, dont de grands artistes comme Pablo Picasso, et mène une vie de bohème.
Lee Miller quitte Man Ray en 1932 et rentre aux Etats-Unis afin d’ouvrir son propre studio. Elle épouse un homme d’affaires égyptien et s’installe au Caire où son goût pour la photographie ne fait que s’amplifier. Pourtant, elle se lasse vite et reprend la direction de Paris où elle rencontre Roland Penrose, artiste surréaliste, qui devient son amant peu de temps avant le début de la Seconde Guerre mondiale.
La carrière de Lee Miller prend un tournant en 1942. L’agence Vogue à Londres lui propose la réalisation de reportages photographiques. Le gouvernement britannique prend conscience du fort potentiel de la presse féminine comme moyen de former les civils, particulièrement les femmes, pour remplacer les hommes partis au front. Elle réalise différentes séances photos sur des femmes habillées en tenues d’usine par exemple. Elle documente aussi le quotidien des civils pendant la guerre : la pauvreté, le rationnement, et surtout le nouveau rôle des femmes comme travailleuses et chefs de famille
Juillet 1944, Lee Miller débarque en Normandie et devient correspondante de guerre
Lee Miller ne s’épanouit pas dans ce travail et ne rêve que d’une chose : aller sur le terrain. Elle est une femme, et cela semble inconcevable.
« Je préférerai prendre une photographie qu’en être une. » Lee Miller
Sa rencontre avec David. E. Scherman va changer le cours de sa carrière. Elle va, avec son soutien, devenir correspondante de guerre officielle pour le magazine Vogue auprès de l’armée américaine. En 1944, elle est envoyée en Europe pour suivre l’armée américaine sur la période qui suit le débarquement en Normandie. Elle est l’une des seules femmes correspondante de guerre présente dans les zones de combat. Elle va aussi être l’une des premières femmes photographes à prendre des clichés des conflits et à capturer des images des camps de concentration après leur libération. Avec David E. Scherman, elle se rend aux camps de Dachau et de Buchenwald.
« Lee est devenue un GI. » David E. Scherman
Portant treillis et casque militaire, Lee Miller se retrouve bien loin de sa vie antérieure de mannequin. La guerre est un moyen pour elle de s’émanciper de son ancienne image de femme-objet.

« La baignoire d’Hitler » une photographie choc au pouvoir symbolique.
Les photos sont protégées par les droits d’auteur, nous ne pouvons pas les afficher sur le site mais vous pouvez les visualiser sur le site officiel des archives de Lee Miller.
Lee Miller va devenir célèbre grâce à une photo d’elle prise dans la baignoire d’Hitler. Le 30 avril 1945, David E. Scherman et Lee Miller se rendent au camp de Dachau afin de documenter sa libération. Le soir-même, peu après l’annonce du suicide d’Hitler dans son bunker, ils se rendent à Munich dans l’appartement du dictateur et y séjournent quelques jours. C’est à cette occasion que la photographe va être immortalisée par son acolyte dans la baignoire d’Hitler, ou encore assise à son bureau, et même couchée dans le lit d’Eva Braun, sa compagne.
« L’endroit était en parfait état. […] Il n’était pas suffisamment vide pour être ‘loué’ en l’état, mais un quart d’heure de ménage pour dépoussiérer les tasses aurait suffi pour le mettre à disposition d’un nouveau locataire à qui la présence de draps et de vaisselle ‘A.H.’ ne gênerait pas. » Lee Miller à Iconics Photos, 1945
La photographie de la baignoire est une image symbolique. Lee Miller se lave littéralement des horreurs commises par Hitler au lendemain de sa mort.
Lee Miller, une femme meurtrie et engagée aux côtés des femmes
Traumatisme d’enfance
Bien qu’élevée dans une famille aisée, Lee Miller n’a pas eu une enfance facile. Elle est victime d’un viol à l’âge de 7 ans, commis par un ami de ses parents. S’ensuit une grave maladie vénérienne qui mettra des années à guérir. Sa relation avec son père photographe se dégrade pendant qu’il continue de la photographier nue alors qu’elle est déjà adolescente. Ces évènements la marquent à jamais et jouent un rôle prédominant dans sa relation avec les hommes et dans son travail.
Les photographies de gardiens
Lee Miller produit une série de photographies au moment de la libération des camps de Dachau et Buchenwald. Elle se focalise sur les gardiens SS qu’elle capte de manière frontale et brutale. Ces photographies explorent les notions de voyeurisme et d’humiliation. C’est là une sorte de revanche personnelle, qui va plus loin que le simple anéantissement du nazisme. Sans aucun doute, ces gardiens prennent, dans l’esprit de Lee Miller, la forme de ses agresseurs passés.
Les femmes dans la guerre
Même si les clichés les plus célèbres de Lee Miller représentent des hommes, il faut souligner que la majorité de ses photographies montrent des femmes. Elle va photographier des infirmières américaines, des recrues de services militaires réservés aux femmes, mais aussi des résistantes ou des femmes tondues à la Libération. L’héritage photographique que laisse derrière elle Lee Miller est très conséquent. L’impact de la guerre sur les femmes n’a jamais été si bien représenté.
Comme un grand nombre de femmes de l’entre-deux-guerres, compagnes ou épouses d’artistes reconnus, Lee Miller a été reléguée au second plan pendant longtemps. Son œuvre personnelle n’a été à l’époque que très peu prise en considération. Encore aujourd’hui, les noms de photographes comme David E. Scherman ou Robert Capa sont reconnu par un plus grand nombre que celui de Lee Miller.
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